« After the Reflection » est une exploration méditative de la mémoire, de la perception et du temps. Inspirée par « Reflets verts » de Claude Monet (Musée de l’Orangerie, Paris), l’œuvre dissèque l’essence de la peinture à travers une grille de collages monochromatiques réalisé à l’aquarelle. Tous tirent leur teinte de la palette vive de l’œuvre originale de Monet, créant un écho harmonieux mais fragmenté de la vision du peintre. Sur ces lavis translucides se superposent des strates denses de notations musicales - des notes choisies pour leur résonance avec la réponse émotionnelle de Khan à la peinture. Au fur et à mesure que les notations sont superposées, elles se fondent en un palimpseste complexe, brouillant la frontière entre la mélodie et le bruit, la structure et le chaos. Le résultat est une cacophonie visuelle et sonore, où le sens est à la fois construit et effacé. Grâce à ce processus presque scientifique de déconstruction et de reconstruction, Khan invite le spectateur à reconsidérer la façon dont les souvenirs sont formés, transformés et finalement réimaginés.
“After the Reflection” by Idris Khan is a meditative exploration of memory, perception, and time. Inspired by Monet’s Green Reflection, the work dissects the painting’s essence through a grid of ten monochromatic watercolour collages. Each panel draws its hue from the original’s vivid palette, creating a harmonious yet fragmented echo of Monet’s vision. Layered over these translucent washes are dense strata of musical notation—scores chosen for their resonance with Khan’s emotional response to the painting. As the notations are repeatedly superimposed, they coalesce into an intricate palimpsest, blurring the line between melody and noise, structure and chaos. The result is a visual and sonic cacophony, where meaning is both constructed and obliterated. Through this almost scientific process of deconstruction and reconstruction, Khan challenges the viewer to reconsider how memories are formed, transformed, and ultimately reimagined.
Au centre de l’exposition, l’artiste érige After Maude 13 Years, une sculpture imposante composée de plus de quatre mille feuilles de papier vierges, ayant chacune un poids équivalent à celui d’une photographie imprimée. Toutes symbolisent les clichés pris journalièrement, jusqu’à ce jour, de Maude, la fille désormais adolescente de l’artiste. Présentée en vis-à-vis de After the Reflection, l’œuvre est une invitation nostalgique à rejoindre père et fille dans un dialogue réflexif privé – c’est avec Maude, alors âgée de sept ans, qu’Idris Khan s’était rendu au musée de l’Orangerie, une visite qui allait inspirer son travail sur Monet.
Les œuvres d’Idris Khan sont toujours changeantes. Elles semblent s’incarner dans une forme ou sur un support pour mieux convoquer leur état précédent ou futur : photographies de peintures ou de pages d’un livre, mots gravés sur des tampons et superposés lors de leur estampillage jusqu’à ce qu’ils disparaissent dans la peinture qui les porte, ou pile de papier vierge et repeint représentant une série d’images témoignant d’une succession de jours. L’art, nous rappellent-elles habilement, contient toujours du travail et du temps, chacune des œuvres marquant un événement discret, chaque trait un geste avec son propre contexte et ses propres circonstances. Une vie, suggèrent-elles, contient des moments tout comme un livre contient des mots, comme une symphonie contient des notes. Tout voir et tout vivre en même temps, comme Idris Khan nous invite à le faire en effondrant les structures qui habituellement les séparent, est une expérience troublante, mais aussi libératrice. Ce phénomène d’accumulation ne revêt ni ne réfute quelque sens que ce soit, mais pose plutôt la question de savoir ce qui – à une échelle inférieure à celle d’une vie – pourrait le contenir. Et de savoir si ce n’est pas le sens, qu’il soit universel ou caché, qui ne cesse de changer.
— Daniel Levin Becker